Conseils de pros : L’impression sur alu brossé pour un effet vibrant et vivant

Depuis plus de 25 ans, le photographe Denis Félix parcourt le monde pour témoigner de la pluralité de l’Homme. En début d’année, nous avons pu découvrir son exposition “Essentia” à la galerie Frédéric Got, dont les tirages grand format ont attiré l’attention du public. Car cet anthropologue à l’outil unique, celui de la chambre photographique, a fait appel à notre laboratoire pour réaliser des impressions directes sur alu brossé. Il nous explique cette découverte.
 
Exposition “Essentia”, les grands tirages en impression directe sur alu brossé en caisse américaine.
 
“Le tirage c’est simplement un visuel fixé sur un support. Mais il faut qu’il raconte une histoire et qu’il transmette une émotion et c’est là que le choix du procédé et du support devient important” - Denis Félix
 
Denis Felix est un amoureux du tirage. Agissant à l’instinct, il aime que chacun de ses projets soit unique. C’est ainsi qu’il explore les différents procédés et supports qui s’offrent à lui pour donner vie à ses photographies, sans aucune limite.
Pour sa dernière exposition “Essentia”, présentée à Paris à la Galerie Frédéric Got, il a souhaité confronter l’ancien au moderne en associant deux séries photographiques. La première est un travail intimiste lié à la mémoire, pour ce voyage intérieur il a souhaité présenter des tirages au platine palladium. Et la seconde propose un travail sur la matière humaine, composée de portraits et détails de peaux imprimés en direct sur de l’aluminium brossé.
 
 
Comment avez-vous découvert l’impression directe sur alu brossé ?
 
J’ai rencontré Vianney, à Picto Grand Paris, pour un projet qui n’avait à la base, rien à voir avec l’exposition “Essentia”. J’avais une commande artistique pour un groupe immobilier et cherchais un support pour des images recomposées très graphiques, il m’a parlé de ce procédé d’impression directe sur alu brossé. Nous avons fait un essai en grand format et le résultat m’a vraiment plu.
Pour cette exposition, je souhaitais faire cohabiter des tirages au palladium qui ont un rendu très fin et précis avec un procédé plus moderne. Je cherchais des brillances et un moyen de faire vibrer les matières et j’ai immédiatement pensé à l’aluminium. C’était la solution idéale pour faire contraster l’effet mat du palladium avec le côté métallique de l’alu. J’ai fait des tests au format final de 120 x 160 cm et j’ai tout de suite été séduit. Ce choix a été une vraie évidence pour ce projet-ci.
 
Exposition “Essentia”, les grands tirages en impression directe sur alu brossé en caisse américaine.
 
Comment ce procédé d’impression sur alu brossé a t-il révélé vos images ?
 
Pour cette série, je voulais obtenir des tons chauds afin d’offrir une belle harmonie avec les tirages au palladium. Le grand format était important, je voulais que l’œil se promène dans l’image. Mais surtout ce que je souhaitais c’est que l’image s’apprécie à la fois dans la lumière et dans la pénombre. Et c’est pour moi l’énorme avantage de l’aluminium car il a une variation très étonnante. Une même image, qu’elle soit dans l’obscurité ou en pleine lumière, change, elle est vibrante et vivante, sans pour autant dénaturer le visuel et le sujet. C’est un effet très propice pour les portraits, on a l'impression d’être absorbé par la personne photographiée. Avec ce procédé, les encres sont séchées immédiatement ce qui offre un rendu très précis, avec des nuances très fines si on le désire. On peut travailler dans le détail avec une qualité très intéressante.
Ces portraits avaient déjà été tirés sur un papier baryté. Le rendu avec les impressions directes sur alu brossé est complètement différent, c’est un autre monde. Ce sont les mêmes images, et pourtant elles dégagent une autre émotion.
J’ai inventé ce terme d’Alumigrammes® (marque déposée), car j’ai ressenti le besoin que ce travail porte un nom spécifique. Avec ce procédé, ces tirages deviennent presque des sculptures photographiques.
 
A gauche : Taquara - Brésil 2010 | A droite : Yu Wenlan - Chine 2009 © Denis Félix.
 
Chaque projet d’exposition est pour vous l’occasion d’explorer de nouveaux supports, comment opérez-vous vos choix ?
 
Exactement, à chaque exposition, je repars à zéro. J’explore ce qui se fait pour choisir le support qui conviendra le mieux. Tout est possible, je peux utiliser les procédés historiques jusqu’aux nouvelles technologies en les associant à une offre de papiers magnifiques. Il y a tellement de possibilités aujourd’hui, c’est passionnant…
Ce qui est essentiel dans une exposition, c’est à la fois de raconter une histoire, et de servir l’émotion que l’on veut traduire. Le choix se fait comme une “promenade”, on avance, on sait globalement quel chemin on souhaite emprunter, et après on va de surprise en surprise. Je n’ai aucun à priori et je me laisse aller à la découverte. C’est aussi une question de rencontres. Et pour le choix de l’impression directe sur alu brossé, je le dois à ma rencontre avec Vianney.
 
Comment réagissent les collectionneurs face à vos Alumigrammes® ?
 
À chaque fois qu’un nouveau support est apparu sur le marché, il y a eu une crainte de la part des collectionneurs. On se souvient encore de l’arrivée du jet d’encre, certains collectionneurs étaient particulièrement réfractaires.
Lorsqu’on a fait les premiers essais avec Vianney, je leur ai fait vivre un cauchemar : je les ai piétinés, malmenés, je les ai laissé en extérieur avec la pluie, le gel, le soleil… Malgré tout cela, les tirages n’ont pas bougé. Leur résistance est absolument phénoménale. Picto a fait des recherches de durabilité avec l’école Louis Lumière, et ils ont pu remarquer que le Latex et l’UV avaient une résistance supérieure aux tirages argentiques et aux impressions jet d’encre pigmentaire. (à lire : https://www.pictoonline.fr/blog/article/picto-actif-dans-la-recherche-avec-ecolen-nationale-superieure-louis-lumiere)
 
 
 
 
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Visuel de Une : A gauche : Kariyayya, Inde 2004 | A droite : Anhusha, Maurice 1996 © Denis Félix