Retour sur les fondamentaux : Le tirage à l'Agrandisseur

Depuis 70 ans, le laboratoire Picto met à disposition son savoir-faire au service des photographes. Sept décennies qui ont vu arriver un certain nombre de (r)évolutions technologiques. Et bien qu’il soit devenu une prestation haut de gamme, le tirage à l’agrandisseur reste l’activité qui aura traversé les époques. Le groupe Pictorial vient d’ouvrir le nouvel ATELIER Filippo, essentiellement consacré au développement et au tirage argentique traditionnel noir et blanc. Retour sur un savoir-faire unique.
 
La laboratoire Picto garde en son sein une chambre noire, dédiée au tirage traditionnel argentique. Deux de nos tireurs en sont aujourd'hui les gardiens : Payram et Fred Jourda.
 
“Pierre Gassmann a éduqué son regard dans l'alignement des plus grands photographes et l'a intégré au laboratoire. Ensuite chaque tireur peut apporter quelque chose de personnel. Aujourd'hui, il y a des photographes qui viennent pour avoir ce regard sur leur travail. On leur apporte des conseils, de la distance, de nouvelles possibilités.” - Payram, tireur noir & blanc
 
 
Un savoir-faire historique
 
Lorsque Pierre Gassmann et sa femme France ouvrent le laboratoire Pictorial service en Janvier 1950, ce sont six agrandisseurs noir et blanc qui sont disposés autour d’un long bac de cuves. Les premiers photographes à faire appel au savoir-faire de Pierre sont les proches et amis de la toute jeune agence qui vient de voir le jour : Magnum. C’est donc ici que sont réalisé les tirages de Henri Cartier-Bresson, Robert Capa, mais aussi Robert Doisneau, Willy Ronis, Edouard Boubat ou encore William Klein…
Depuis 70 ans, les techniques traditionnelles de tirage n’ont pas changé et sont perpétuées au fil des générations par des artisans expérimentés. Aujourd’hui à Picto Bastille, il y a Payram, pour le tirage en noir et blanc, et Fred Jourda, pour les tirages en argentique couleur. Et depuis l’inauguration de l’Atelier Filippo, Christophe Pete et Laurent Hutin s’affèrent au développement et tirage traditionnels en noir et blanc.
 
Un service sur mesure qui permet aux photographes d’avoir l’accompagnement idéal sur la réalisation de leurs tirages de collection et d’exposition. Afin de privilégier l’échange et le partage de savoir-faire, les tirages sont réalisés en présence du photographe, pour s’assurer du rendu attendu par son auteur.
 
 
Le fonctionnement
 
Au laboratoire, le format maximum possible en tirage à l’agrandisseur est le 150 x 100 cm, au-delà, il faudra se diriger vers un autre procédé d’impression. Plusieurs supports papiers sont à disposition, le célèbre papier baryté ou le papier RC.
L’artisan, tirant à l’agrandisseur, travaille sous lumière inactinique* pour le noir et blanc, et dans le noir absolu pour la couleur, afin d’éviter d’exposer le support papier. Le film est placé dans le porte négatif, pour que l’agrandisseur puisse projeter l’image sur une surface plane, sur laquelle on place le support papier photosensible à la dimension souhaitée. Pour s’assurer de la parfaite netteté de l’image projetée, le tireur utilise un compte fil. Après plusieurs essais d’exposition sur des morceaux de papier, qu’il viendra révéler et fixer dans les bains, le tireur passe au tirage final, qui nécessite parfois un important travail de masquage, procédé permettant d’exposer plus ou moins certaines parties de l’image au flux lumineux de l’agrandisseur. En pratique traditionnelle noir et blanc, une fois que le papier est insolé, le tireur va plonger le support dans un bain de révélateur, suivi d’un bain d’arrêt, qui a pour but de stopper l’effet du révélateur, avant de fixer définitivement l’image sur le papier, dans un bain fixateur. Le tirage termine dans un long bain de rinçage à l’eau claire, avant de passer au séchage. Les étapes de bains chimiques sont également réalisées par des développeuses noir et blanc et couleur, qui permettent la finalisation du tirage après exposition sous l’agrandisseur.
 
 
Le laboratoire peut utiliser également une développeuse qui comprend trois phases de bain : le révélateur, le fixateur, et le lavage (ce dernier doit être très soutenu pour le papier baryté). Un cycle de machine dure en moyenne 30 minutes. Pour les papiers RC, les tirages sont secs dès la sortie de la machine et sont prêts à être découpés, le procédé est plus long et complexe lorsqu’il s’agit d’un papier baryté qui nécessite un temps de séchage entre 12 à 24 heures. À cette étape, le support baryté se rétracte, un opérateur va maroufler** le papier encore humide pour éviter au maximum l’ondulation du support.
Pour la couleur, le papier est développé dans un procédé chimique chromogène RA4. Ce processus se fait en quatre étapes : le révélateur, le blanchiment-fixage, le lavage et enfin le séchage. À la sortie de la machine, le tirage est prêt !
 
 
* inactinique : Émettant pas ou peu d'effets photochimiques. Ainsi, le papier photosensible noir et blanc à base de sels d'argent, sera insensible à cette lumière.
** maroufler : consiste à fixer le papier à un support plus solide et rigide.
 
 
Photo : © Marine Ferrante
 
 
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